Focus sur la situation de l’emploi des seniors et des possibles évolutions de ce bassin d’actifs dans les années à venir.
Suite au report à 64 ans de l’âge légal de départ à la retraite, aux discussions sur les mises en place d’un « index seniors » et d’un CDI senior, il nous semble nécessaire, en tant qu’experts du recrutement de cadres dirigeants, de faire un focus sur la situation de l’emploi des seniors et des possibles évolutions de ce bassin d’actifs dans les années à venir.
Car, aux phénomènes de vieillissement de la population, d’augmentation de l’espérance de vie et d’entrée plus tardive des jeunes sur le marché du travail par rapport à leurs aînés, d’autres tendances alarmantes ont été observées après la crise de la Covid-19 :
➡️ Un recul historique des naissances en 2022 ;
➡️ Un pourcentage inquiétant de salariés en burn out (34% d’après un sondage récent) ;
➡️ Une augmentation notable du nombre de démissions (près de 470 000 démissions de CDI entre la fin 2021 et début 2022) ;
➡️ Des difficultés de recrutement (notamment dans les filières de l’industrie manufacturière, des services et du bâtiment) ;· Un turn over plus élevé et de nouvelles attentes quant à la notion de « carrière » chez les millenials et Gen Z ;·
➡️ Un nombre d’actifs qui devrait être en baisse à partir de 2040 (d’après les prévisions de l’Insee et de la Dares) ;
Etat des lieux de la place des seniors dans le monde de l’entreprise en France
Il convient dans un premier temps de rappeler que le mot « sénior » a plusieurs sens.
- Personne d’expérience : 31% des recruteur·se·s estiment qu’un profil senior (ex. consultant senior) a plus de 15 ans d’expérience 1
- Personne âgée : 63% des recruteur·se·s estiment qu’un senior a 50 ans et plus (23% estiment qu’une personne est senior dès l’âge de 45 ans).1
En 2021, la France comptait 30,1 millions d’actifs (pour 67 millions d’habitants) constitués de Français travailleurs et chômeurs entre 15 et 64 ans. 27,7 millions occupant un emploi et 2,4 millions étant au chômage.
Sur les 8,4 millions de 55-64 ans, 56,1 % étaient en emploi au 4e trimestre 2021 (62 % dans le reste de l’Europe) et ce taux d’emploi baisse très fortement à l’âge de 60 ans, passant à 35,5%.
Paradoxalement, le taux de chômage des seniors (6,3%) est plus bas que celui de l’ensemble des actifs. Comment l’expliquer ? Parmi les hypothèses régulièrement émises : la préretraite, les radiations de Pôle emploi, les non-inscrits, les formations…
En ce qui concernent les cadres, même s’ils sont moins impactés, certaines populations sont plus exposées au risque de chômage. Ainsi, en 2022, les séniors de 55 ans et plus représentent 102 000 cadres demandeurs d’emploi, dont 34 % de femmes et 36 % de demandeurs d’emploi longue durée (plus de 12 mois sans emploi).
Leur taux de chômage est plus élevé que le reste de la population cadre avec 6,8 % (vs 4,1 % au global) et ce dernier est plus élevé pour les résidents hors Ile-de-France (7,5%).
Il est également à noter que les deux tiers du volume des ruptures de contrat dans le cadre de plans sociaux enregistrées par Pôle emploi à suite de la crise Covid concernaient les plus de 50 ans. Par ailleurs, une étude de l’Unedic, publiée le 1e mars dernier, a observé en 2021 une hausse des ruptures conventionnelles « d’un commun accord » à l’âge de 59 ans.
La dure réalité du recrutement des seniors
Contrairement aux idées reçues, les cabinets de recrutement soutiennent et proposent les profils seniors.
- « 6 recruteur.se.s sur 10 proposent des candidatures de seniors à des managers opérationnels ou clients qui n’envisageaient pas ce type de profil a priori. Si 21% d’entre eux sont recruté.e.s, 25% sont recalé.e.s en raison de leur âge, qu’ils aient été reçu.e.s en entretien ou pas ».
- « 76% des recruteurs (et même 80% des recruteurs en cabinet) pensent qu’un dispositif légal imposant l’embauche de seniors aurait un effet bénéfique sur le taux d’emploi de cette population. »
Et pourtant, c’est un fait : les seniors sont souvent discriminés lors des processus de recrutement.
Parmi les freins relevés dans l’étude Ipsos pour A Compétence Égale en 2022 :
- La faible adaptation aux nouvelles technologies
- Le temps restant avant la retraite
- La santé plus fragile
- Le coût pour l’entreprise
- Trop de compétences par rapport au poste
- Des difficultés d’intégration dans des équipes plus jeunes
Ces freins évoqués sont en effet d’un autre âge ! Si l’espérance de vie a augmenté c’est bien parce que les conditions de vie, de santé et de bien-être au travail se sont améliorés. Les « quinquas » d’aujourd’hui ne ressemblent plus à leurs aînés.
Rappelons qu’il existe une loi qui impose aux entreprises de plus de 50 salariés à être couvertes par un accord ou un plan d’action relatif au maintien dans l’emploi et au recrutement des seniors. Changement de paradigme : Et si on reportait ce mot « senior » à 60 ans ? Reculer l’âge auquel on attribue le terme « senior » à 60 ans au lieu de 50 ans pourrait être une solution pour faire changer les perceptions. Rappelons que l’Organisation Mondiale de la Santé définit statistiquement les individus comme « personnes âgées » à partir de 60 ans.
Ensemble, pensons global et agissons différemment en intégrant et en impliquant plus fortement les 50 ans et plus.
Depuis plus de 40 ans (donc pas encore seniors !) les équipes d’Agora Search transforment le recrutement en opportunités stratégiques et pilotent la performance des équipes et de l’organisation.
Luce Nordon
CEO Agora Search